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    Caractéristiques du droit de marque

    Un droit exclusif

    Une marque enregistrée donne à son titulaire le droit exclusif de l'utiliser. Cela signifie que lui seul a le droit d'utiliser ou de ne pas utiliser la marque protégée ou d’autoriser l’utilisation par un tiers. Attention, si au cours des cinq années qui suivent l’enregistrement le titulaire de la marque ne l’utilise pas pour les produits ou services pour lesquels elle est enregistrée, il risque de perdre la protection conférée par la marque (voir l'extinction de la marque).

    En outre, le titulaire de la marque peut la céder (par exemple la vendre) ou la donner en licence (accorder à un tiers un droit d'utiliser la marque). Il a également le droit d'agir contre des tiers qui portent atteinte à la marque et d’invoquer la nullité des enregistrements postérieurs de marques qui portent sur le même signe ou un signe similaire. Si des tiers veulent enregistrer des signes identiques ou similaires en tant que marques pour des produits identiques ou similaires, le titulaire d'une marque antérieure pourra introduire une procédure d'opposition auprès de l'Office Benelux de la Propriété Intellectuelle (marque Benelux) ou de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (marque de l’Union européenne) et demander que les demandes d'enregistrement plus récentes soient rejetées.

    Application du principe de spécialité et de territorialité

    Le droit exclusif du titulaire de la marque n'est toutefois pas absolu. 

    En premier lieu, la marque n'est protégée que sur le territoire pour lequel l'enregistrement a été obtenu (principe de territorialité). En d'autres termes, une marque Benelux confère au titulaire un droit exclusif sur le signe, uniquement dans les trois pays du Benelux, mais par exemple pas en France, en Suède ou au Japon, à moins qu'un enregistrement ait également été obtenu dans ces pays. (Voir également la demande de marque de l'Union européenne ou de marque internationale). Par le biais du  droit de priorité on peut empêcher que d'autres enregistrent le signe dans un délai de six mois après le premier dépôt effectué dans un autre pays.

    D’autre part, la marque enregistrée confère des droits exclusifs uniquement en cas d'usage du signe en relation avec les produits ou services pour lesquels elle a été enregistrée. La marque n’est donc jamais protégée dans l’absolu. Cette règle - connue sous le nom de règle de spécialité - implique que plusieurs entreprises peuvent avoir des droits de marque sur le même signe au sein d'un même territoire, mais pour des produits ou services différents (par exemple, la marque "Lotus" enregistrée comme marque pour des biscuits, des voitures et du papier de toilette par des entreprises différentes).

    Il existe une exception à cette règle pour les titulaires de marques qui ont acquis une certaine renommée. Ces derniers pourront agir au-delà de leur domaine  commercial et s’opposer à l’usage ou au dépôt postérieur de leur signe pour des produits ou services qui ne sont pas similaires (voir hypothèse 3 ci-dessous).

    Etendue de la protection

    Le titulaire de la marque a le droit exclusif d'utiliser la marque pour les produits ou les services pour lesquels il a obtenu un enregistrement. La caractéristique essentielle de ce droit exclusif réside dans sa fonction d'interdiction. D'autres ne pourront pas utiliser le même signe ou un signe similaire sans le consentement du titulaire de la marque. Des tiers ne pourront, par exemple, pas appliquer ce signe sur leurs produits ou leurs emballages ni l'utiliser dans leur publicité.

    L'étendue exacte du droit exclusif - et le droit d'interdire - dépend d'un certain nombre de facteurs. L'usage contre lequel le titulaire peut agir doit en principe se situer dans la vie des affaires. Ce concept de « vie des affaires » est assez large et comprend tout usage dans le cadre d'une activité commerciale ou professionnelle où est poursuivi un avantage économique. Ne sont pas inclus l'usage purement privé ou l'usage à des fins purement scientifiques.

    Dans l'hypothèse d'un usage dans la vie des affaires, il faut distinguer quatre situations où le titulaire d'une marque Benelux ou d’une marque de l’Union européenne peut agir :

    1. l’usage d'un signe identique pour des produits ou services identiques ;
       
    2. l’usage d'un signe identique ou similaire pour des produits ou services identiques ou similaires: Dans cette situation, le titulaire de la marque doit également prouver qu'il existe un risque de confusion pour le consommateur quant à l'origine des produits ou des services en question. Le risque de confusion vaut également lorsque la confusion résulte de l’association du signe avec la marque antérieure ;
       
    3. l’usage d’un signe identique ou similaire pour des produits ou services identiques, similaires ou non similaires, lorsque la marque jouit d’une renommée dans le territoire concerné.
      Le titulaire d'une marque renommée devra également prouver que, par l'usage du signe, sans juste motif, le tiers tire un avantage injustifié du caractère distinctif ou de la renommée de la marque (dilution ou parasitisme) ou leur porte préjudice.
      Par exemple, l'usage de Klarein pour des produits d'entretien a été considéré comme une atteinte à la célèbre marque de genièvre Clareyn en raison d'atteinte à la réputation de la marque. Le consommateur risque en effet d’être moins attiré par du genièvre qui lui fait penser à un détergent !
      Le tiers peut se défendre en invoquant qu'il a une raison valable (un juste motif) pour utiliser la marque renommée, mais cette défense n'est pas facilement acceptée.
       
    4. Pour la marque Benelux, outre ces trois cas d’usage de la marque dans la vie des affaires, il existe une quatrième situation dans laquelle le titulaire de la marque peut agir, alors même que l'usage de la marque n’a pas lieu dans la vie des affaires. C'est le cas de l’usage d’un signe identique ou similaire d'une autre manière que "comme une marque." Cette situation vise l'usage du signe par des tiers non pas pour distinguer leurs produits ou services, mais pour d'autres raisons. Par exemple, des tiers utilisent la marque en tant que décoration (par exemple, un motif à rayures), dans un film ou d'autres médias, dans un nom commercial ou dans de la publicité. Ou encore, des tiers utilisent la marque sur l’Internet. Il pourrait s'agir d'un enregistrement de nom de domaine par un «cybersquatteur», ou encore d’une mention d'une marque dans les métatags d’une page Web. Comme dans l'hypothèse (3), le titulaire de la marque devra prouver que l’usage du signe tire un profit injustifié du caractère distinctif ou de la renommée de sa marque ou que cet usage leur porte préjudice et que le tiers en question ne peut invoquer aucune raison valable pour justifier cet usage.

    Toutefois, il existe quelques exceptions où l’usage de la marque d’autrui ne constitue pas une atteinte à la marque.

    Cession et licence

    Le titulaire de la marque peut décider à tout moment de céder sa marque, par exemple de la vendre. Les entreprises vont régulièrement envisager cette option lorsqu’elles analysent leur portefeuille de marques. Pour que la cession entre vifs soit valable, elle doit être faite par écrit et comprendre l'ensemble du territoire du Benelux. Pour que la cession soit opposable aux tiers, un extrait de l’acte qui la constate doit en outre être enregistré dans le registre Benelux des marques. 

    Le titulaire de la marque peut également tirer profit de la valeur économique de sa marque en accordant un droit d’usage – une licence - à des tiers. Cette licence fait l’objet d'un contrat fixant de façon précise les conditions de l'usage (usage exclusif ou non, pour tout ou partie des produits ou services concernés, durée, étendue territoriale, etc.). Un document écrit n'est cependant pas nécessaire pour la validité de la licence. Toutefois, l’enregistrement d’un extrait de l’acte qui constate la licence, dans le registre Benelux, est nécessaire pour rendre la licence opposable aux tiers.

    Le contenu spécifique des contrats de cession et de licence est en général  librement négociable. Toutefois, les règles du droit de la concurrence doivent être respectées.

    Agir contre les atteintes à la marque

    Lorsque un tiers porte atteinte à la marque, c'est-à-dire lorsqu’il accomplit l'un des actes décrits sous la rubrique « Etendue de la protection », sans qu’aucune exception ou restriction ne soit d’application, le titulaire de la marque peut poursuivre ce tiers en justice pour contrefaçon. Il demandera principalement la cessation de l’acte contrefaisant, mais un tribunal peut aussi ordonner d'autres mesures. Plus d’informations sur la mise en œuvre des droits.

    Agir contre les dépôts de marques postérieurs

    Le titulaire d'une marque a le droit d’empêcher les dépôts postérieurs de signes qui entrent dans l’étendue de la protection de sa marque. Cela peut d’abord se faire pendant la procédure d'enregistrement par l'introduction d’une opposition contre l'enregistrement d’une marque postérieure à la sienne. Si la marque déposée postérieurement (marque plus jeune) a quand même été enregistrée, le titulaire peut introduire une procédure en annulation de la marque. Le premier dépôt a donc rendu le signe indisponible.

    Dernière mise à jour
    29 juillet 2021