La Belgique consolide sa place parmi les pays leaders en matière d’innovation
L’European Innovation Scoreboard (EIS) établit une analyse comparative des performances en matière de recherche et d’innovation des états membres de l’UE, d’autres pays européens et de régions voisines. Un classement est réalisé sur la base des résultats de l’indice global d’innovation obtenus par les pays évalués. Cet indice global est composé de 32 indicateurs regroupés sous 12 dimensions telles que :
- les ressources humaines,
- la digitalisation,
- l’utilisation des technologies de l’information.
L’édition 2023 de l’EIS enregistre un changement dans le top 5 : le Danemark prend la tête du classement suivi de la Suède, de la Finlande, des Pays-Bas et de la Belgique. Notre pays, avec un score global de 125,8 %, appartient pour la troisième année consécutive au groupe « Innovation Leader », ce qui démontre que notre pays est une terre de recherche et de développement (R&D) et un lieu qui accueille et encourage l’innovation (Rapport belge en matière de science, technologie et innovation - BRISTI, 2021).
L’EIS souligne les forces et les faiblesses des systèmes d’innovation nationaux, permettant ainsi aux pays d’identifier les domaines de croissance et d’amélioration. En 2023, la Belgique occupe :
- la 1re place pour deux indicateurs spécifiques :
- dépenses d'innovation par personne employée (1re place à égalité avec la Suède et l’Irlande),
- PME introduisant des innovations dans le processus de fonctionnement de l’entreprise (1re place à égalité avec la Grèce et Chypre),
- la 2e place pour deux indicateurs spécifiques :
- soutien gouvernemental direct et indirect à la R&D des entreprises,
- dépenses en R&D des entreprises,
- la 3e place pour les PME innovantes collaborant avec d'autres.
Par ailleurs, pour améliorer le soutien à la R&D et à l’innovation ayant aussi un impact sur la position de notre pays dans l’European Innovation Scoreboard, il importe de concentrer des efforts sur les indicateurs suivants :
Mobilité de l’emploi des ressources humaines en sciences et technologies (RHST)
La mobilité géographique des ressources humaines en sciences et technologies est généralement considérée comme un atout pour les chercheurs car elle permettrait
- d’acquérir de nouvelles expériences,
- d’approfondir leurs connaissances,
- d’élargir leur réseau,
- de se mesurer à la concurrence,
en résumé, d’améliorer son profil scientifique (« Researchers on the move : The impact of brain circulation », OECD, 2013).
La mobilité des RHST est donc un vecteur important de diffusion du savoir dans l’ensemble de l’économie. Du point de vue du marché du travail, la mobilité offre une répartition efficiente du travail entre les secteurs. En effet, la faiblesse des taux de mobilité intra- et intersectorielle des RHST peut rendre plus difficile une adéquation de l’offre et de la demande de travail. Aussi, une plus forte mobilité des travailleurs semble être corrélée avec la croissance de la productivité multifactorielle (OCDE, 2004 « Politiques de la science et de l’innovation : principaux défis et opportunités »).
État des lieux
Alors que la Lituanie (de la 7e à la 1re place) et Chypre (de la 5e à la 3e place) ont progressé dans le classement de l’indicateur de mobilité de l’emploi des RHST entre 2018 et 2023, la Belgique a reculé de la 9e place à la 19e place sur 27 pays (NL : 2e à 7e, DE : 4e à 6eet FR : 16e à 10e).
Obstacles
Le Conseil des recteurs et rectrices (CRef) et le Vlaamse Interuniversitaire Raad (VLIR) qui rassemblent les onze universités de Belgique ont souligné, lors de la deuxième édition du Forum VLIR-CRef en février 2023, des obstacles à la mobilité internationale, notamment :
- le délai de traitement administratif de la mobilité des RHST par les autorités fédérales et régionales reste trop long,
- la coordination et la communication entre les différents services gouvernementaux concernés doivent être améliorées,
- le traitement des demandes de visa peut également être optimisé
- la sécurité juridique des chercheurs étrangers doit être réformée.
Propriété intellectuelle
La propriété intellectuelle désigne les œuvres de l’esprit protégées par la loi, par exemple au moyen de brevets, du droit d’auteur et d’enregistrements de marques, qui permettent aux créateurs de tirer une reconnaissance ou un avantage financier de leurs inventions ou créations. Ces œuvres de l’esprit peuvent désigner :
- des inventions ;
- des œuvres littéraires et artistiques ;
- des dessins et modèles ;
- des emblèmes, noms et images.
La propriété intellectuelle est un puissant outil de croissance et de développement durable, qui agit comme un catalyseur pour la création d'emplois, le développement économique et la vitalité sociale. (OMPI, 2023).
État des lieux
L’indicateur de l’EIS sur la propriété intellectuelle pointe que la Belgique s’était positionnée à la 15e place en 2018 et a seulement gagné une place en 2023 (DE : 5e à 6e, FR : 14e à 17e, NL : 8e à statu quo).
Une étude a montré que seulement 3 % des entreprises belges ont obtenu un droit de propriété intellectuelle (DPI) entre 2010 et 2019 (« Analyse économétrique de l’utilisation des systèmes de protection de la propriété intellectuelle en Belgique », Université catholique de Louvain et le bureau d'étude IDEA Consult, 2022).
Obstacles
Les principaux obstacles identifiés sont
- le manque de connaissances sur les DPI ;
- les coûts perçus comme élevés ;
- le manque de moyens des PME.
(Kitching & Blackburn, 1998 ; Burrone, 2005 ; Nikzad, 2015 ; EUIPO, 2019).
Pour les lever, plusieurs initiatives ont récemment été lancées au niveau européen, notamment
- le plan stratégique 2023 de l'OEB ;
- le plan stratégique 2025 de l'EUIPO ;
- la stratégie PME de la Commission européenne (CE, 2020).
Exportations de produits de moyenne et haute technologie
L'indicateur des exportations de produits de moyenne et haute technologie mesure la compétitivité technologique de l'Union européenne, c'est-à-dire la capacité à commercialiser les résultats de la recherche et du développement (R&D) et de l'innovation sur les marchés internationaux. Cela reflète également la spécialisation des produits par pays. La création, l'exploitation et la commercialisation de nouvelles technologies sont essentielles à la compétitivité d'un pays dans l'économie moderne. Les produits de moyenne et haute technologie sont des moteurs essentiels de la croissance économique, de la productivité et du bien-être, et sont généralement une source d’emplois à haute valeur ajoutée et à rémunération élevée.
État des lieux
Entre 2018 et 2023, notre pays est passé de la 18e à la 16e place sur 27 pays (DE : 1e à 3e, FR : 6e à 12eet NL : 15e à 20e). Malgré l’accroissement de nos exportations de produits de moyenne et haute technologie, principalement imputable au secteur pharmaceutique et à la production de vaccins contre le Covid-19, la Belgique reste à un niveau en-dessous de l’Allemagne, de la France et des Pays-Bas.
Obstacles
Une des conditions essentielles pour la production de biens de haute technologie est la présence de main-d’œuvre qualifiée dans le segment technologique (« Rapport sur l'évolution de l'emploi et de la situation sociale en Europe, CE, 2023 »). La moyenne de l’Union européenne (UE27) des 20-29 ans diplômés de l'enseignement supérieur en sciences, mathématique, informatique, ingénierie, industrie de transformation, production pour 1.000 habitants est passée de 19,7 en 2018 à 21,9 en 2021 (dernière donnée disponible). Cette augmentation est en partie le résultat d’efforts réalisés dans de nombreux pays comme en Belgique (14,0 à 16,4). Cependant, en niveau, notre pays reste bien en deçà de la moyenne UE27, de l’Allemagne (20,1 à 24,0) et du Danemark (23,3 à 26,1).
Technologies liées à l'environnement
L'éco-innovation représente la production, l'assimilation ou l'exploitation d'un produit, d'un processus de production, d'un service ou d'une méthode de gestion ou d'affaires qui est nouvelle pour l'organisation (le développant ou l'adoptant) et qui entraîne, tout au long de son cycle de vie, une réduction du risque environnemental, de la pollution et autres impacts négatifs de l’utilisation des ressources (y compris la consommation d’énergie) par rapport aux alternatives existantes (« Measuring eco-innovation » Kemp, Pearson, 2007).
Les technologies liées à l’environnement constituent aujourd’hui de véritables outils stratégiques et de compétitivités pour les firmes, car elles leur permettent de contrôler les effets de leurs activités sur l’environnement, de réduire les risques de réputation et d’éviter des coûts supplémentaires. Selon des études récentes, le développement des technologies vertes tend à réduire les émissions de CO2 sur le long terme (Mongo, Belaid, Ramdani, 2021).
L’indicateur du nombre de technologies liées à l’environnement mesure l’activité inventive sur la base des données des brevets (OECD Green Growth database). Cependant, ces chiffres doivent être interprétés avec prudence car toutes les inventions et innovations ne sont pas brevetées. De plus, le nombre de brevets ne suffit pas à indiquer leur importance et impact relatifs.
État des lieux
L’analyse du nombre de brevets sur les technologies liées à l’environnement déposés auprès de l’OEB indique que la Belgique s’est classée à la 21e place en 2018 et a progressé à la 14e place en 2023. Cette amélioration est également constatée chez ses principaux partenaires commerciaux (DE : 7e à 2e, FR : 10e à 5e et NL : 22e à 13e). Malgré cette progression, notre pays reste en retrait par rapport à l’Allemagne, la France et les Pays-Bas.
Obstacles
Quatre raisons seraient à l’origine des résultats de la Belgique (Aghion, Hemous et Veugelers, 2009) :
- Une première raison qualifiée par les économistes d’ « externalité environnementale », autrement dit au fait que les producteurs, qui cherchent à maximiser leur profit, ne sont pas tenus de prendre en compte dans leurs choix de production et d’investissement les dommages qu’ils font subir au climat. Ils n’ont, dans ce cadre, aucun intérêt de réduire à court terme leur pollution et à innover seuls.
- Une deuxième raison a trait à ce qu’on qualifie d’ « externalité de connaissance » : dans une situation de laisser-faire, les entreprises ont tendance à orienter leurs efforts d’innovation vers les secteurs où elles disposent déjà d’un avantage technologique. La plupart du temps, il s’agit de secteurs émetteurs de CO2.
- Troisièmement, l’innovation est souvent freinée à cause d’un problème d’appropriabilité : les entreprises rechignent à innover si elles ne peuvent pas bénéficier pleinement des retombées financières de leurs découvertes. Cet effet est susceptible de jouer un grand rôle pour les technologies vertes, car celles-ci sont particulièrement complexes et impliquent des processus cumulatifs offrant d’importantes retombées. Dès lors, les nouvelles technologies environnementales courent le risque d’être insuffisamment protégées par le droit traditionnel des brevets, si celui-ci n’est pas renforcé par des mécanismes d’appropriation complémentaires.
- Un quatrième obstacle à l’innovation réside dans la difficulté d’accéder à des financements adéquats, en raison de l’imperfection des marchés financiers. Cette contrainte est d’autant plus forte pour les innovations environnementales que celles-ci sont, d’un point de vue technique, particulièrement risquées – notamment les plus radicales d’entre elles. Leur commercialisation présente en outre des risques élevés en raison des conditions de marché actuellement incertaines. L’addition des incertitudes techniques et commerciales pèse lourdement sur les phases initiales de développement.